Fondateur du média

Fondateur du média
Jameson LEOPOLD est Travailleur social et Gestionnaire. Il a fait des études de maîtrise en Sciences du développement à la Faculté d’Ethnologie et en Conseil et expertise en action publique à l’Université Toulouse 1 Capitole. Il est reconnu comme consultant en migrations et réintégration (déportation, retour volontaire et fuite des cerveaux), en renforcement institutionnel (création d’organisations, élaboration et gestion de projets) et en évaluation de projets. Fort de trois années d’études en linguistique, il a fondé Plume Souveraine et occupe actuellement le poste de directeur de la communication au sein du parti Konbit Pou Demokrasi.

vendredi 27 juin 2025

Il faut dire aux Américains que Haïti ne peut pas accueillir des centaines de milliers de retours forcés

 

Ce 27 juin 2025, le DHS, sous la direction de Kristi Noem et dans la droite ligne de l’administration Trump, a annoncé la fin du Statut de Protection Temporaire (TPS) pour les ressortissants haïtiens. Cette décision, qui prendra effet le 3 août 2025, laissera plus de 500 000 Haïtiens en situation irrégulière dès le 2 septembre, sauf recours ou changement législatif majeur.

La justification officielle avancée par le DHS repose sur l’argument que les conditions d’urgence qui avaient motivé le TPS — notamment le séisme de 2010 et les crises humanitaires successives — ne seraient plus d’actualité. L’administration affirme vouloir rétablir la nature "temporaire" du programme TPS, en mettant fin aux prolongations jugées abusives. Pourtant, cette décision intervient dans un moment où la réalité haïtienne est tout sauf stabilisée.

Sur le terrain, Haïti fait face à une crise sans précédent : les groupes armés contrôlent la capitale et plusieurs régions, les institutions républicaines sont à l'arrêt, l’accès à la santé, à l’alimentation, et à l’éducation est devenu extrêmement difficile. Le pays fonctionne sans gouvernement légitime, sans parlement, et sans système judiciaire opérationnel. Les conditions de sécurité sont inexistantes, même pour les citoyens ordinaires, sans parler de rapatriés sans appui familial.

Dans ce contexte chaotique, l’idée de forcer le retour de centaines de milliers d’Haïtiens relève non seulement de l’irréalisme, mais aussi d’une certaine forme d’inhumanité. Il ne s’agit pas ici d’un débat migratoire abstrait, mais de vies humaines bien réelles : des familles, des travailleurs intégrés, des enfants nés américains, qui seront séparés ou renvoyés dans un pays qu’ils ne connaissent parfois même pas.

Cette décision révèle une volonté politique claire de l’administration Trump de durcir l’immigration dans toutes ses dimensions, au mépris des conséquences sociales et diplomatiques. Elle touche particulièrement les populations noires et caribéennes, avec une rigueur que beaucoup jugent discriminatoire et idéologique. Les Vénézuéliens, les Ukrainiens ou les Afghans ont vu leur TPS prolongé ; pas les Haïtiens. Pourquoi ?

Haïti ne dispose actuellement d’aucune capacité d’accueil, de réinsertion ni d’accompagnement pour recevoir un tel afflux. Même le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le PAM et l’OIM ont récemment signalé que les conditions de vie y sont incompatibles avec un retour massif. La société civile est essoufflée, les ONG dépassées, et l’État quasi inexistant. Renvoyer les Haïtiens aujourd’hui, c’est injecter de la déstabilisation supplémentaire dans un pays déjà en chute libre.

Il est donc crucial que la communauté internationale, les leaders haïtiens de la diaspora, les défenseurs des droits humains et les institutions religieuses s’unissent pour exiger un moratoire, une régularisation ou une loi de résidence permanente pour ces Haïtiens. Une telle décision ne doit pas être acceptée en silence. Haïti ne peut pas encaisser un choc migratoire aussi brutal sans sombrer davantage. Et les États-Unis ont une responsabilité morale envers ces vies qu’ils ont protégées, parfois pendant plus d’une décennie.

Steevenson Louis


14 commentaires:

Eliminer les gangs sans résoudre les problèmes sociaux, c'est du « lave men siye atè »

Pour s’attaquer efficacement à l’insécurité en Haïti, il faut d’abord en identifier les causes profondes et structurelles. L’une d’elles dem...