Comment peut-on rénover et moderniser six universités avec 58 millions de gourdes ?

Quand on parle de modernisation universitaire, on pense à des campus sécurisés, à des bibliothèques numériques performantes, à des laboratoires bien équipés et à des salles de cours adaptées aux nouvelles technologies. Mais avec seulement 58 millions de gourdes – soit environ 400 000 dollars américains – répartis entre six universités publiques, il est évident que nous sommes loin d’un véritable projet de modernisation. Ce montant, aussi symbolique soit-il, ne peut suffire qu’à quelques retouches superficielles.

Prenons un exemple simple : la construction d’un seul bloc administratif aux normes parasismiques, avec un minimum d’équipement moderne, coûte déjà plusieurs dizaines de millions de gourdes. Alors, comment croire qu’avec ce budget dérisoire, on pourra financer à la fois des laboratoires, des bibliothèques, des systèmes énergétiques, du mobilier et du matériel pédagogique ? Le contraste entre les promesses et la réalité saute aux yeux.

Le problème réside dans la stratégie du saupoudrage. Plutôt que de concentrer les ressources sur un ou deux campus pour en faire de véritables pôles de référence, l’État préfère distribuer quelques millions par-ci par-là, juste assez pour donner l’impression que toutes les universités sont concernées. Résultat : aucune ne bénéficie d’une transformation en profondeur. Ce n’est pas une modernisation, c’est de la poudre aux yeux.

Ce qui choque encore plus, c’est de constater que certaines universités privées, parfois modestes, parviennent à investir davantage dans leurs infrastructures grâce à une meilleure gestion et des partenariats ciblés. Pendant ce temps, les universités publiques survivent dans un état de délabrement chronique, dépendant de financements étatiques présentés comme des réformes, alors qu’ils ne suffisent même pas à couvrir leurs besoins essentiels.

Il est urgent de sortir de cette logique cosmétique. Le pays n’a pas besoin de rénovations ponctuelles qui servent uniquement à des annonces médiatiques, mais d’un plan stratégique et durable, basé sur des investissements massifs, une gouvernance transparente et une vision de long terme pour l’enseignement supérieur. Sans cela, les étudiants continueront d’étudier dans des salles surpeuplées, sans électricité régulière, sans laboratoires modernes et sans accès réel aux technologies contemporaines.

Au fond, la vraie question est simple : veut-on vraiment moderniser l’enseignement supérieur en Haïti, ou veut-on seulement se donner bonne conscience avec de petites enveloppes budgétaires présentées comme de grandes réformes ? Avec 58 millions de gourdes pour six universités, le FNE n’a pas financé la modernisation : il a juste offert un coup de peinture politique. Et les étudiants, eux, continueront à payer le prix de cette hypocrisie.

Jamesley Rolls-Ainé 

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